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Publié : 24 mars 2010

Le prix Abel 2010 remis à John Tate

Lu dans Libération

C’est John Terence Tate qui a reçu aujourd’hui le prix Abel, une sorte de Nobel des maths qui récompense l’ensemble d’une oeuvre. Donc un prix pour matheux âgé, à l’inverse de la médaille Fields pour laquelle il faut avoir moins de quarante ans.

L’an dernier, c’est Mikhaïl Gromov (Institut des hautes études scientifiques, à Bures sur Yvette) qui avait été récompensé. Le premier récipiendaire du Prix Abel, en 2003, fut le Français Jean Pierre Serre, son portrait en dernière page de Libération est ici.

John Tate travaille à l’Université du Texas à Austin et l’académie norvégienne des sciences l’a récompensé pour son rôle dans l’évolution de la théorie des nombres.

Voici le communiqué de l’Académie des sciences de Norvège : « Pour l’étendue et le caractère durable de son influence sur la théorie des nombres. Au-delà de la simple arithmétique de 1, 2, 3,… il existe un monde complexe et sinueux qui a posé bien des difficultés aux esprits les plus remarquables à travers l’Histoire. Ce monde s’étend des mystères des nombres premiers à la façon dont nous stockons, transmettons et protégeons l’information dans nos ordinateurs modernes. C’est ce qu’on appelle la théorie des nombres. Au cours du siècle dernier, cette théorie s’est développée en l’une des branches les plus élaborées et sophistiquées des mathématiques, en interagissant profondément avec d’autres domaines comme la géométrie algébrique et la théorie des formes automorphes.

John Tate est un architecte de premier ordre de ce développement. La thèse de Tate, sur l’analyse de Fourier en corps de nombres, soutenue en 1950, a ouvert la voie à la théorie moderne des formes automorphes et de leurs fonctions L.

Tate a révolutionné la théorie globale du corps de classes avec Emil Artin, en utilisant des techniques nouvelles de cohomologie des groupes. Avec Jonathan Lubin, il s’est livré à la refondation de la théorie locale du corps de classes par une utilisation ingénieuse des groupes formels. L’invention des espaces analytiques rigides de Tate a engendré le domaine entier de la géométrie analytique rigide. Il a trouvé un analogue p-adique à la théorie de Hodge, maintenant appelée théorie de Hodge–Tate, qui s’est épanouie en une autre technique fondamentale de la théorie moderne des nombres algébriques.

Une profusion d’idées et de constructions mathématiques essentielles ont été initiées par Tate, y compris la cohomologie de Tate, le théorème de la dualité de Tate, les groupes de Barsotti–Tate, le motif de Tate, le module de Tate, l’algorithme de Tate pour les courbes elliptiques, la hauteur de Néron–Tate sur les groupes de Mordell– Weil de variétés abéliennes, les groupes de Mumford–Tate, le théorème de l’isogénie de Tate et le théorème de Honda–Tate pour les variétés abéliennes sur les corps finis, la théorie de la déformation de Serre–Tate, les groupes de Tate–Shafarevich et la conjecture de Sato–Tate concernant les familles de courbes elliptiques. Et la liste est loin d’être close.

Nombre de lignes majeures de recherche en théorie des nombres algébriques et en géométrie arithmétique ne sont possibles qu’en raison de la contribution incisive et l’intuition instructive de John Tate. Il a vraiment laissé une empreinte incontestable sur les mathématiques modernes. »


Communiqué sur le site du prix Abel

Professor Marcus du Sautoy on John Tate